« Les Japonais sont si polis et hospitaliers » est une idée souvent partagée par les Français. Mais d’où vient-elle ?
Si vous vous êtes déjà rendus au Japon, peut-être avez-vous remarqué l’attention particulière souvent apportée dans les commerces ou chez des hôtes pour accueillir les clients ou les invités. Il s’agit d’un concept de l’hospitalité développé au Japon au 16e siècle dans le cadre de la cérémonie du thé, et qui encore aujourd’hui est appliqué au quotidien : l’omotenashi.
« Omotenashi » est un concept particulier qui peut être interprété de plusieurs façons d’un point de vue sémantique. La plus littérale d’entre elles signifie « sans recto-verso » ou « sans avoir deux faces », une expression qui souligne la sincérité d’une personne. Faire preuve d’omotenashi serait donc avant tout le fait d’accueillir chacun à coeur ouvert.
L’expression est également liée à une forme ancienne de politesse qui désigne le fait d’accomplir des « choses » au sens large, incluant aussi bien des actions concrètes que la manifestation de nos sentiments.
La subtilité de l’omotenashi réside dans son application par chacun : puisqu’il s’agit d’une notion très conceptuelle et abstraite, il n’existe pas vraiment de « guide » de l’omotenashi au même titre qu’il existe des guides des bonnes manières. Bien qu’il existe des manières communes au Japon de manifester cette hospitalité, l’omotenashi réside davantage dans la volonté de transmettre un sentiment de bienveillance, d’accueil et de partage du moment présent, et est donc interprété comme tel par chacun.
Dans la cérémonie du thé
C’est avant tout dans la cérémonie du thé, développée au 16e siècle par le maître de thé Sen no Rikyu, que l’omotenashi trouve sa manifestation la plus évidente.
En effet, la cérémonie du thé ou sadô est avant tout un moment de partage : le thé sert à rassembler les personnes, à partager un moment tous ensemble dans un cadre artistique et épuré, aussi bien par son esthétique que par le déroulé même de la cérémonie.
De plus, saviez-vous qu’en japonais « ima » signifie littéralement « maintenant, ici » et le concept de notre boutique est également rattaché à l’un des concepts développés par Sen no Rikyu : 一期一会 ichi go ichi e, qui évoque l’idée d’une rencontre unique, d’un moment fixé dans le temps et l’espace qui ne se reproduira pas et dont il faut profiter.

Le chakaiseki
La cuisine kaiseki désigne aujourd’hui le pendant gastronomique de la cuisine japonaise traditionnelle. Elle est décomposée en une grande quantité de petits plats à l’esthétique travaillée. Dans le bouddhisme, le terme de kaiseki désignait les pierres chaudes gardées par les moines dans leurs vêtements pour apaiser leur faim durant leurs jeûnes. Inspiré de cette pratique, la cérémonie du thé inclut le chakaiseki, une forme de petit repas qui sert à ouvrir l’appétit des invités et les faire patienter jusqu’à ce que l’eau du thé bout avant le « plat » principal de la cérémonie : le thé. Il est souvent composé de trois petits plats travaillés qui sont presque de la taille d’une bouchée et de nature variée. Il s’agit le plus souvent de riz blanc, d’une soupe, d’un met mijoté et/ou d’un met grillé.
La cuisine kaiseki et le chakaiseki partagent tous deux un objectif commun, qui est celui de mettre en avant et de célébrer les produits de chaque saison, tout en étant un plaisir pour le palais et les yeux.
Dans cet esprit, la saisonnalité joue un rôle extrêmement important dans la cérémonie du thé : la décoration de la pièce dans laquelle elle se déroule est adaptée à la saison, en particulier avec le kakemono (rouleau vertical) accroché dans le tokonoma (sorte de niche décorée). Les sucreries traditionnelles servies pour accompagner le thé, les wagashi, sont également adaptées à chaque saison.

Introduire un peu d’omotenashi chez soi
Même si omotenashi et chakaiseki sont à l’origine des concepts intrinsèquement liés au cadre unique de la cérémonie du thé, rien n’empêche aujourd’hui de les appliquer dans le domaine du quotidien, même en France ! Vous pouvez par exemple proposer à vos invités de faire l’expérience d’un chakaiseki avant de prendre une tasse de thé. Voici quelques idées simples de recettes:
. Préparez un bouillon dashi miso, et faites-y blanchir une courgette coupée en morceaux larges pendant 4-5 minutes. Servez dans un bol.
. Salez des morceaux de saumon et laissez reposer 2 minutes. Retirez le sel, déposez les morceaux sur du papier cuisson dans une poêle et faites cuire pendant 20 minutes. Retournez les morceaux à mi cuisson.
. Coupez la base d’un paquet de champignons enoki. Coupez les en deux ainsi qu’une poignée d’épinards.
Faites les blanchir dans un bouillon dashi. Egouttez et salez avant de servir.
. Servez le tout avec un petit peu de riz blanc rond.
Recettes originales sur maff.go.jp (おうちで茶懐石!大切なのはお客様を思う心)

「おうちで茶懐石!大切なのはお客様を思う心 」 鹿持渉 KAJI Wataru
Sources
https://www.maff.go.jp おうちで茶懐石!大切なのはお客様を思う心 (jp)
https://www.maff.go.jp 茶人に聞く、茶事をもっと身近に (jp)
https://www.jiu.ac.jp/files/user/education/books/pdf/837-41.pdf (jp)
https://www.omotenaship.co.jp/omotenashi-organization/what-omotenashi/? (jp)
Le style washoku – pdf (fr)